DMA : Apple, de nouveau dans le collimateur de la Commission européenne, reporte le lancement d’Apple Intelligence au sein de l’UE

La Commission européenne a informé lundi dernier Apple de son avis préliminaire selon lequel les règles de l’App Store sont jugées contraires au règlement sur les marchés numériques (DMA), car elles limitent la liberté des développeurs d’applications. Par ailleurs, la Commission a ouvert une nouvelle enquête sur les nouvelles exigences contractuelles d’Apple, y compris la “Core Technology Fee”, qui pourraient également ne pas respecter le DMA.

Le 6 septembre 2023, Apple, ainsi que cinq autres géants technologiques : Alphabet, Amazon, ByteDance (la maison mère de TikTok), Meta et Microsoft, ont été désignés comme contrôleurs d’accès par la Commission européenne. Ces entreprises doivent depuis le 6 mars dernier se conformer pleinement aux obligations du DMA, qui vise à garantir une concurrence équitable et à empêcher les pratiques déloyales sur les marchés numériques.

Le 25 mars dernier, la Commission a lancé à l’encontre de certaines d’elles des enquêtes pour des pratiques telles que l’autofavoritisme dans Google Search par Alphabet et le modèle “Pay or Consent” de Meta. Pour Apple, les enquêtes portent sur les règles d’orientation dans l’App Store et le modèle de distribution d’applications alternatives.

En cas de confirmation des infractions, Apple pourrait se voir infliger des amendes allant jusqu’à 10 % de son chiffre d’affaires mondial total, soit près de 40 milliards d’euros, voire jusqu’à 20 % en cas d’infractions répétées. Des mesures correctives supplémentaires pourraient également lui être imposées, telles que la vente d’une partie de l’activité ou l’interdiction d’acquérir des services supplémentaires liés au non-respect systémique constaté.

Que reproche exactement la Commission à Apple ?

Selon la Commission, les règles d’Apple concernant l’App Store empêchent les développeurs d’orienter librement les consommateurs vers d’autres canaux d’achat et de contenu. L’avis préliminaire souligne :

  • Des restrictions sur les informations et la communication : les développeurs ne peuvent pas fournir d’informations sur les prix ou promouvoir des offres disponibles sur d’autres plateformes directement depuis l’application ;
  • Une orientation limitée via des liens : Apple autorise uniquement les développeurs à inclure des liens dans leurs applications, redirigeant les utilisateurs vers des sites web externes. Toutefois, ce processus est soumis à des restrictions strictes qui limitent la capacité des développeurs à communiquer et à conclure des ventes ;
  • Des commissions excessives : Apple facture des commissions non seulement pour l’acquisition initiale de nouveaux clients via l’App Store, mais aussi pour chaque achat de biens ou services numériques effectué dans les sept jours suivant l’utilisation d’un lien externe, une pratique jugée excessive par la Commission.

Apple dispose désormais de l’opportunité de répondre aux constatations préliminaires et de présenter sa défense, la Commission examinera ses réponses avant de rendre une décision finale au plus tard le 25 mars 2025. La société s’est déjà vue infliger en mars dernier une amende de 1,8 milliard d’euros pour abus de position dominante sur le marché de la musique en ligne suite à une plainte de Spotify en 2019.

Elle a par ailleurs décidé il y a une semaine de ne pas lancer trois fonctionnalités à venir sur IOS 18, dont Apple Intelligence, son IA générative. Son porte-parole justifie cette décision :

“Nous craignons que les obligations de la DMA en matière d’interopérabilité ne nous force à mettre en péril l’intégrité de nos produits d’une manière risquée pour la sécurité des données et leur protection”. 

Ouverture d’une nouvelle enquête

Par ailleurs, la Commission a ouvert une nouvelle enquête visant à déterminer si les nouvelles conditions contractuelles d’Apple respectent les exigences de nécessité et de proportionnalité du DMA.

Les principaux points d’examen incluent :

  • Le “Core Technology Fee” : Une commission de 50 centimes d’euro par application installée, imposée aux développeurs de boutiques d’applications et d’applications tierces ;
  • Le parcours utilisateur pour installation d’applications : Les multiples étapes nécessaires pour télécharger et installer des boutiques d’applications ou des applications alternatives sur les iPhones ;
  • Les conditions d’éligibilité des développeurs : Les critères que les développeurs doivent remplir pour proposer des boutiques d’applications ou distribuer des applications directement depuis le web, y compris l’exigence d’une “adhésion en règle” au programme Apple Developer.

Pour Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence, l’envoi de ces constatations préliminaires à Apple est très important pour l’application effective du DMA.

Thierry Breton, Commissaire au marché intérieur déclare, faisant allusion au slogan d’Apple “Think different”, déclare :

“Le nouveau mot d’ordre chez Apple devrait être d’«agir différemment». Aujourd’hui, nous prenons de nouvelles mesures pour garantir qu’Apple respecte les dispositions du DMA. Nous avons des raisons de penser que les règles relatives à l’App Store ne permettant pas aux développeurs d’applications de communiquer librement avec leurs propres utilisateurs sont contraires au DMA. Nous ouvrons également un nouveau dossier concernant les nouvelles conditions commerciales d’Apple relatives à iOS. Sans préjudice des droits de la défense d’Apple, nous sommes déterminés à utiliser la panoplie d’outils bien établis et efficaces offerte par le DMA pour enfin ouvrir de réelles possibilités au bénéfice des innovateurs et des consommateurs”.

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