Health Data Hub : des entreprises s’insurgent contre la décision de la CNIL et saisissent le Conseil d’Etat

Le Health Data Hub, plateforme de données de santé des patients français lancée en 2019, a choisi Microsoft Ireland pour héberger ces données particulièrement sensibles sur Azure. Choix qui a été loin de faire l’unanimité et bien qu’il ait été conforté en décembre dernier par la CNIL, plusieurs sociétés, associations et particuliers dont Clever Cloud, Cleyrop, Nexedi, Rapid.Space, l’Open Internet Project, l’Association de défense des libertés constitutionnelles et Bernard Benhamou de l’Institut de la souveraineté numérique ont décidé de saisir le Conseil d’Etat.

Le Health Data Hub a été créé pour permettre de croiser les bases de données de santé (système national des données de santé, données collectées auprès des hôpitaux, des médecins…) et faciliter leur utilisation par les nombreuses équipes de recherche et de développement avec un respect total de la vie privée des usagers du système de santé.

Le ministère de la Santé et de la Prévention et la CNIL privilégiaient à l’origine un hébergeur européen mais le ministère ayant considéré qu’il n’y avait pas de solutions européennes opérationnelles avant 2025, Microsoft Azure, qui avait été choisi comme hébergeur cloud sans appel d’offres, est amené à le rester pour quelque temps encore. Le problème est que même si ces données sont stockées dans des datacenters situés en France, Microsoft est basé aux Etats-Unis et sa filiale irlandaise est soumise au droit américain, ce qui implique la possibilité légale de demandes de communication des données par l’administration des Etats-Unis.

Dès 2020, la CNIL a exprimé des préoccupations concernant le risque de transfert de données vers les États-Unis. Des requérants, associations et professionnels, ont alors saisi le Conseil d’Etat d’un recours demandant la suspension du Health Data Hub. Dans son ordonnance du 13 octobre 2020, le Conseil d’État reconnaissait l’existence d’un risque de transfert de données issues du Health Data Hub vers les États-Unis et demandait des garanties supplémentaires, mais, au regard de son utilité pour la gestion de la crise sanitaire, refusait de suspendre le fonctionnement de la plateforme.

Le Health Data Hub a remporté fin 2021 l’appel d’offres lancé par l’Agence européenne du médicament (EMA) visant à constituer un entrepôt de données de santé multi-centrique afin de permettre aux établissements de santé, aux institutions publiques, aux associations de patients ou encore aux agences européennes comme l’EMA de réaliser des recherches, des études et des évaluations. Cet entrepôt de données de santé dénommé “EMC2” est alimenté par les données de 4 établissements de santé partenaires avec un appariement à la base principale du Système National de Données de Santé (SNDS).

S’appuyant sur les avis de la DNS (Délégation au numérique en santé), l’Agence du Numérique en Santé (ANS), la Direction Interministérielle du Numérique (DINUM) et l’Institut National de Recherche en Informatique et en Automatique (INRIA), la CNIL a rendu en décembre dernier un avis favorable sur la capacité du Health Data Hub à gérer ce projet et l’a autorisé à mettre en œuvre le traitement automatisé de données à caractère personnel ayant pour finalité la constitution de cet entrepôt de données de santé.

Ce qui sous-entend que Microsoft va héberger pendant trois ans de nombreuses informations médicales de 300 000 à 600 000 patients français au grand dam des entreprises françaises et européennes qui seraient légitimes sur ce marché.

Clever Cloud, Cleyrop, Nexedi, Rapid.Space, l’Open Internet Project, l’Association de défense des libertés constitutionnelles et Bernard Benhamou demandent l’annulation de la décision de la CNIL, ou du moins la transmission d’une question préjudicielle à la CJUE, La Cour de justice de l’UE.

L’affaire sera traitée en audience publique le 19 mars à 11h, une conférence de presse sera organisée en présence des requérants le 18 mars à 8h30 au café le Concorde, à Paris.

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