Le LaborIA publie les résultats de son enquête sur les usages et les impacts de l’IA sur le travail

Lancé le 19 novembre 2021, d’une durée de 5 ans, LaborIA est une initiative du Ministère du Travail, du Plein emploi et de l’Insertion et d’Inria ayant pour objectif de « mieux cerner l’intelligence artificielle et ses effets sur le travail, l’emploi, les compétences et le dialogue social afin de faire évoluer les pratiques des entreprises comme l’action publique ». Projet de recherche conçu comme une zone d’expérimentation, opéré par Matrice, le LaborIA Explorer publie les premiers résultats de l’enquête qualitative menée auprès de 250 décideurs.

Le LaborIA s’inscrit dans le cadre de l’initiative PMIA, qui vise à combler le fossé entre la théorie et la pratique sur l’IA en soutenant la recherche de pointe et les activités appliquées sur les priorités liées à l’IA. L’un des groupes de travail de cette initiative, consacré à la thématique « Avenir du travail », est affilié au Centre d’expertise du PMIA de Paris et hébergé par Inria, il mène, entre autres, des analyses sur la manière dont l’IA affecte et affectera les travailleurs et leur environnement. La création du LaborIA répond aux recommandations de ce groupe et entre dans le cadre de la Stratégie nationale pour l’IA.

Le programme LaborIA

Le programme LaborIA doit d’abord envisager le rapport des entreprises et des acteurs publics à l’IA, puis, dans un second temps, déployer des expérimentations concrètes, sur le lieu de travail, concernant des thématiques diverses : conditions de travail, évolution des compétences, recrutement, dialogue social technologique…

Il vise également à créer un lieu de débats et d’échanges entre tous les acteurs de la société civile, partenaires sociaux et décideurs publics.

Le premier volet du programme est consacré à la conduite d’une enquête sur l’IA au travail, opérée par Matrice, un institut d’innovation technologique et sociale fondé en 2016, qui est à la fois organisme de formation, incubateur, centre de recherche, laboratoire d’innovation et lieu de création artistique.

Mesurer les impacts des systèmes D’IA au sein des entreprises

Cette enquête, focalisée sur les impacts de l’usage des systèmes d’IA (SIA) en entreprise, pose les premiers jalons du LaborIA. Elle repose sur des interviews multipartites (direction générale, direction RH, direction des systèmes d’information, direction de l’innovation), explorant les usages et les représentations de l’IA qu’ont les décideurs d’entreprises françaises de plus de 50 salariés.

Basée sur un panel représentatif des entreprises françaises, elle met en évidence les systèmes d’IA les plus utilisés, les motifs qui ont présidé à leur mise en œuvre, les freins et obstacles que les projets ont dû lever. L’étude intègre également les impacts ressentis ou projetés des systèmes d’IA (SIA) sur les différentes dimensions du travail.

Les réponses au questionnaire ont été recueillies par téléphone sur système CATI (Computer Assisted Telephone Interview) au mois de septembre 2022.

Parmi les 250 répondants, 40% occupent un poste dans le secteur des ressources humaines, et près de la moitié d’entre eux déclarent occuper un poste dans un service informatique ou un service financier.

Ils sont issus pour 15% d’entre eux de l’industrie, pour 15% de l’administration publique, pour 13% des services financiers, pour 9% du BTP, de la construction et du transport, et pour 34% d’autres services. 70% de l’échantillon travaillent dans des TPE et des PME et 30% dans des ETI et des grandes entreprises.

Les industriels sensiblement représentés parmi les utilisateurs de SIA

Sur les 250 répondants, 53 (soit 21,2% de l’échantillon) ont déclaré avoir un SIA opérationnel ou en projet dans leur entreprise.

La proportion d’utilisateurs de SIA dans le secteur industriel est sensiblement supérieure à celle que l’on constate dans les autres secteurs d’activité. Le secteur du BTP, de la construction et du transport présente, quant à lui, le moins de cas d’usage de SIA.

15% des répondants travaillant dans une PME déclarent utiliser un SIA contre 22% de ceux travaillant dans une ETI ou une grande entreprise.

Pour quels usages ?

Tous secteurs confondus, les SIA les plus utilisés dans les entreprises du panel sont les SIA de détection de défauts et d’anomalies (35%), suivis des machines autonomes (19%), des chatbots etcallbots (16%), des SIA utilisant la vision (11%)et des SIA linguistiques (5%).

Le niveau d’avancement du projet

Parmi les répondants concernés par la mise en place d’un SIA, 14% d’entre eux évoquent un projet en cours d’expérimentation, 18% un projet en déploiement et 68% un SIA déjà déployé et utilisé.

Les SIA les plus avancés sont pour la plupart des systèmes de détection de défauts ou anomalies et des machines autonomes se trouvant situés dans le secteur industriel qui présente par ailleurs les projets de SIA les plus matures de l’échantillon : 98% des SIA dans l’industrie sont en déploiement ou déjà déployés, contre 74% dans l’administration publique ou 79% dans les « autres services ».

Il est à noter que les projets sont généralement plus avancés lorsqu’il sont réalisés par des prestataires externes.

Les motifs d’utilisation des SIA

Les motifs d’utilisation les plus cités par les utilisateurs de SIA sont :

  • la réduction des risques d’erreurs (81%);
  • l’amélioration des performances des salariés (75%);
  • la réduction des tâches fastidieuses (74%).

Les freins à la mise en place de SIA

Les freins évoqués par les répondants sont :

  • Le coût de l’investissement nécessaire;
  • Le manque d’expertise interne;
  • Le problème de compatibilité avec les outils existants.

Ces freins semblent plus importants pour les entreprises les plus grandes, en particulier celui du manque d’expertise en interne mais les industriels seraient moins impactés par les 3 freins cités.

Perception des impacts de l’IA sur le travail

La perception des impacts de l’IA sur le travail est très différente selon les répondants utilisant un SIA et les non-utilisateurs.

  • 96% des répondants ayant déclaré utiliser un SIA dans leur organisation estiment que l’IA a eu un impact très positif ou plutôt positif sur leur travail. Les non-utilisateurs sont quant à eux plus prudents : la moitié d’entre eux envisageant plutôt que l’IA ne causera aucun impact, voire un impact plutôt négatif sur leur travail, leur métier ou leur secteur d’activité;
  • 29% des utilisateurs estiment que l’IA a impacté les relations interpersonnelles au travail, tandis que 43% des non-utilisateurs envisagent cette dimension comme un élément de risque;
  • 72% des utilisateurs déclarent un impact des SIA sur leur autonomie, tandis que cette nature d’impact n’est évaluée comme un risque que pour 56% des non utilisateurs.

Cette étude met en évidence qu’en matière d’impact sur le travail, les représentations sociales diffèrent selon le degré de familiarité à l’IA et que l’intensité de l’impact ressenti diminue à mesure que les projets d’IA gagnent en maturité.

Sur la base de ces résultats, les auteurs du rapport soutiennent l’idée que les représentations sociales liées à l’IA peuvent être des freins puissants à l’usage de l’IA dans les organisations. En conséquence, ils recommandent aux acteurs économiques et politiques de s’appuyer sur l’expérimentation concrète des SIA.

Cette enquête sera complétée par les résultats des investigations terrain, qui ont déjà débuté et se poursuivront jusqu’en juin 2023. Les résultats du LaborIA Explorer ont vocation à devenir des outils d’aide à la décision pour les décideurs publics et les entreprises.

Bruno Lucas, Délégué général à l’emploi et à la formation professionnelle conclut :

« Cette première enquête réalisée dans le cadre du LaborIA avait pour objectif d’interroger les impacts de l’IA au plus près des entreprises, et notamment d’analyser ses effets sur le rapport et le sens au travail. Sans minimiser les impacts sur les organisations de travail induits par la mise en place des systèmes d’IA, le rapport publié aujourd’hui fait le constat d’un écart entre les impacts réels et supposés d’une utilisation de l’IA dans un environnement professionnel. Cela démontre la nécessité d’un accompagnement des salariés dans les entreprises lorsque des systèmes d’IA sont mis en place. »

Lire l’enquête complète

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