La Convention-cadre du Conseil de l’Europe sur l’IA et les droits de l’homme, la démocratie et l’État de droit est le premier instrument international juridiquement contraignant dans ce domaine. Adoptée à Strasbourg le 17 mai dernier lors de la réunion ministérielle annuelle du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe et ouverte aux pays non-européens, elle vise à encadrer les systèmes d’IA tout au long de leur cycle de vie.
Le Conseil de l’Europe, est une organisation internationale fondée le 5 mai 1949, ayant pour but de promouvoir la démocratie, les droits de l’homme et l’État de droit en Europe. En cas de violation, les citoyens de ses 46 États membres peuvent saisir la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), son organe judiciaire.
Une collaboration internationale
Fruit de deux années de travail du Comité sur l’intelligence artificielle (CAI), la convention a été élaborée en collaboration avec les 46 États membres du Conseil de l’Europe, l’Union européenne, ainsi que 11 États non membres incluant des pays comme l’Argentine, l’Australie, le Canada et les États-Unis. Des représentants du secteur privé, de la société civile et du monde académique ont également participé aux discussions en tant qu’observateurs.
Un cadre juridique pour une IA éthique et responsable
Adoptée à l’unanimité, cette convention a pour but de répondre aux défis posés par l’IA, en garantissant que son développement et son utilisation se fassent dans le respect des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit.
Marija Pejčinović Burić, Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, saluant son adoption, a expliqué :
“La Convention-cadre sur l’intelligence artificielle est un traité international unique en son genre qui fera en sorte que l’intelligence artificielle soit respectueuse des droits des personnes. Elle répond à la nécessité de disposer d’une norme de droit international bénéficiant du soutien d’États de différents continents unis par des valeurs communes, qui permet de tirer parti des avantages de l’intelligence artificielle, tout en réduisant les risques qu’elle représente. Avec ce nouveau traité, nous entendons garantir une utilisation responsable de l’IA, respectueuse des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit”.
Les principaux objectifs de la convention-cadre
- Transparence et responsabilité : La convention impose des exigences de transparence pour tous les systèmes d’IA, y compris l’identification des contenus générés par l’IA et l’information des utilisateurs lorsqu’ils interagissent avec ces systèmes.
- Évaluation des risques : Les parties devront adopter des mesures pour identifier, évaluer, prévenir et atténuer les risques potentiels associés à l’utilisation des systèmes d’IA. En cas de risques incompatibles avec les normes relatives aux droits de l’homme, des mesures appropriées telles que des moratoires ou interdictions pourront être mises en place.
- Protection des droits de l’homme : Le traité établit des responsabilités claires en matière de protection des droits de l’homme, veillant à ce que les systèmes d’IA respectent l’égalité, notamment l’égalité de genre, interdisent la discrimination et protègent la vie privée.
- Préservation de la démocratie : Il exige des mesures pour s’assurer que l’IA ne soit pas utilisée de manière à porter atteinte aux institutions démocratiques, à la séparation des pouvoirs, à l’indépendance de la justice, et à l’accès à la justice.
- Voies de recours : Les victimes de violations des droits de l’homme liées à l’utilisation des systèmes d’IA devront disposer de recours et de garanties procédurales efficaces.
Exemptions du traité
Des exemptions sont prévues pour équilibrer la protection des droits de l’homme, de la démocratie et de l’État de droit avec les enjeux de sécurité nationale, de défense et d’innovation technologique.
Ainsi, les États parties ne sont pas contraints d’appliquer les dispositions du traité aux activités qui sont essentielles pour la protection de leurs intérêts de sécurité nationale. La convention exclut également les activités de recherche et développement de son champ d’application général à condition que la mise à l’essai des systèmes d’IA n’interfèrent pas avec les droits de l’homme.
Mise en œuvre
Pour assurer une mise en œuvre efficace, la convention établit un mécanisme de suivi via une conférence des parties. Les États signataires devront également mettre en place des mécanismes de contrôle indépendants pour surveiller le respect de la convention, sensibiliser le public et mener des consultations multipartites sur l’utilisation de l’IA.
La signature officielle du traité aura lieu à Vilnius, Lituanie, le 5 septembre prochain, lors d’une conférence des ministres de la justice.