Une interface cerveau-ordinateur permet à un homme atteint de SLA de retrouver sa voix

Une équipe de chercheurs de l’UC Davis Health a développé une interface cerveau-ordinateur (BCI) qui permet à un homme atteint de sclérose latérale amyotrophique (SLA) de retrouver sa capacité à communiquer. Cette technologie innovante, qui traduit les signaux cérébraux en paroles avec une précision pouvant atteindre 97 %, pourrait redonner espoir aux millions de personnes atteintes de paralysie et de troubles de la parole dans le monde.

L’interface BCI a été implantée dans le cerveau de Casey Harrell, un homme de 45 ans souffrant de la maladie de Lou Gehrig (SLA), une maladie neurodégénérative qui affecte les cellules nerveuses responsables du contrôle des mouvements et des muscles de la parole. Grâce à ce dispositif, Casey Harrell peut désormais s’exprimer par l’intermédiaire d’un ordinateur qui convertit son activité cérébrale en texte parlé, avec une précision qui n’avait jamais été atteinte dans le domaine des neuroprothèses vocales.

L’étude rapportant ces travaux “An Accurate and Rapidly Calibrating Speech Neuroprosthesis” a été publiée le 14 août dernier dans le New England Journal of Medicine.

Des débuts prometteurs pour une technologie innovante

Le Dr David Brandman, neurochirurgien à l’UC Davis et co-auteur principal de l’étude avec Nicholas Card, a supervisé l’implantation de quatre réseaux de microélectrodes dans le gyrus précentral gauche de Casey Harrell une région du cerveau clé pour la coordination des mouvements de la parole. Ces électrodes captent l’activité neuronale lorsque Casey tente de parler, permettant ainsi au système de déchiffrer les phonèmes et les mots qu’il essaie de prononcer. Les mots sont affichés sur l’écran de l’ordinateur avant d’être traduits à voix haute par un modèle de synthèse vocale pré-entraîné affiné par les chercheurs.

David Brandman souligne :

“Cette technologie BCI a non seulement permis à Casey de communiquer avec ses proches, mais elle ouvre la voie à un nouveau monde d’interactions pour des patients incapables de parler. Nous avons franchi une étape décisive dans la compréhension et la décodification de l’activité cérébrale liée à la parole”. 

Lors des premiers tests, le dispositif a montré une précision impressionnante de 99,6 % avec un vocabulaire limité à 50 mots, après seulement 30 minutes d’entraînement. En augmentant la taille du vocabulaire à 125 000 mots, le BCI a maintenu une précision de 97,5 %, marquant ainsi une avancée sans précédent.

Une voix retrouvée grâce à l’intelligence artificielle

Malgré les avancées récentes dans la technologie BCI, les tentatives de rétablir la communication ont été lentes et souvent imparfaites. En effet, les algorithmes de machine learning utilisés pour décoder les signaux cérébraux demandaient beaucoup de temps et de données pour fonctionner efficacement.

David Brandman explique :

“Les systèmes BCI de discours précédents comportaient de fréquentes erreurs de mots. Il était donc difficile pour l’utilisateur d’être compris de manière cohérente et constituait un obstacle à la communication. Notre objectif était de développer un système qui permette à quelqu’un d’être compris chaque fois qu’il veut parler.”

Ce qui rend cette technologie encore plus remarquable est la capacité du système à reproduire la voix de Casey telle qu’elle était avant l’apparition de la SLA, cinq ans plus tôt. L’équipe a utilisé des enregistrements audio de Casey datant d’avant la maladie pour entraîner l’IA à générer une voix proche de celle d’origine, restituant non seulement ses mots, mais aussi son identité vocale.

Sergey Stavisky, neuroscientifique à l’UC Davis et co-directeur du laboratoire de neuroprothèses, a souligné l’importance de cette avancée :

“Voir Casey exprimer des pensées et des émotions à travers sa propre voix a été incroyablement émouvant. Pour lui, comme pour nous, c’était un moment de joie pure”.

Perspectives

L’essai clinique, intitulé BrainGate 2, se poursuit avec d’autres participants, et les chercheurs espèrent que cette technologie pourra bientôt être généralisée pour améliorer la vie de milliers de patients atteints de paralysie sévère.

Casey Harrell, le premier patient à bénéficier de cette technologie, résume son expérience :

“Ne pas pouvoir parler, c’est être prisonnier de soi-même. Grâce à cette technologie, je retrouve une partie de ma liberté, et je peux à nouveau participer aux conversations”.

L’équipe de recherche continue de perfectionner le système pour augmenter encore plus la précision et la fluidité du dialogue, avec l’espoir que d’autres applications médicales suivront.

Cette percée est un immense pas en avant pour la science et la technologie, mais surtout pour les millions de personnes dans le monde qui rêvent de retrouver une voix. Avec cette technologie, ce rêve pourrait bientôt devenir une réalité.

Références de l’article :

  • Université de Californie – Davis Health
  • “An Accurate and Rapidly Calibrating Speech Neuroprosthesis” New England Journal of Medicine. DOI : 10.1056/NEJMoa2314132

Auteurs : Nicholas S. Card, Maitreyee Wairagkar, Carrina Iacobacci, Xianda Hou, Tyler Singer-Clark, Francis R. Willett, Erin M. Kunz, Chaofei Fan, Maryam Vahdati Nia, Darrel R. Deo, Aparna Srinivasan, Eun Young Choi, Matthew F. Glasser, Leigh R. Hochberg, Jaimie M. Henderson, Kiarash Shahlaie, Sergey D. Stavisky, David M. Brandman.

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