Retour sur les trois lauréats des Prix Inria scientifiques 2021 : Jean-Bernard Lasserre, l’équipe CONVECS et Serena Villata

Instaurés en 2011, les Prix INRIA ont pour vocation de promouvoir les contributions et succès de celles et ceux qui font avancer les sciences informatiques et mathématiques, participant ainsi au développement du monde numérique. Organisés par INRIA et ses partenaires historiques, l’Académie des sciences et Dassault Systèmes, trois prix ont été remis cette année à Jean-Bernard Lasserre, à l’équipe CONVECS (Inria/LIG/CNRS/Université Grenoble Alpes/Grenoble INP) et à Serena Villata.

Les trois catégories de prix Inria scientifiques

  •  Le Grand Prix Inria – Académie des sciences, d’un montant de 25 000 €, qui récompense un ou une scientifique ayant contribué de manière exceptionnelle au champ des sciences informatiques et mathématiques. Cette personne doit exercer son activité dans le cadre d’un établissement français ou être émérite d’un établissement français.
  • Le Prix de l’innovation Inria – Académie des sciences – Dassault Systèmes d’un montant de 20 000 €, décerné conjointement par l’Académie des sciences, Dassault Systèmes et Inria, récompense un ou une scientifique, ou une équipe de scientifiques (constituée au maximum de 6 personnes) ayant été particulièrement actifs dans le domaine du transfert et de l’innovation dans le champ des sciences informatiques et mathématiques. Ces personnes, de toute nationalité et affiliation, doivent exercer leur activité dans le cadre d’un établissement français ou être émérites d’un établissement français.
  • Le Prix Inria – Académie des sciences jeunes chercheurs et jeunes chercheuses, d’un montant de 20 000 €, décerné conjointement par l’Académie des sciences et Inria, récompense un ou une scientifique de moins de quarante ans (année de naissance 1981 ou postérieure, avec un délai allongé d’un an par enfant), de toute nationalité et affiliation, exerçant son activité dans le cadre d’un établissement français, et ayant contribué de manière majeure par ses activités de recherche, de transfert ou d’innovation au champ des sciences informatiques et mathématiques.

Les Lauréats 2021

Le Grand Prix Inria – Académie des sciences a été décerné à Jean-Bernard Lasserre pour ses travaux de recherche, notamment en optimisation mathématique. La reconnaissance d’une carrière scientifique exemplaire, avec des contributions majeures et des applications dans de nombreux domaines des sciences et de l’ingénierie.

Jean-Bernard Lasserre est mathématicien, directeur de recherche émérite CNRS au LAAS-CNRS et à l’Institut de Mathématiques de Toulouse (IMT – CNRS/INSA Toulouse/UT1 Capitole/UT2J/UT3 Paul Sabatier), titulaire de la chaire “Polynomial Optimization” à l’Institut ANITI de l’Université fédérale Toulouse Midi-Pyrénées. 

Fondateur de la méthodologie “Moments-Sommes de Carrés” (basée sur des certificats de positivité de la géométrie algébrique réelle) pour l’optimisation, il étudie ses nombreuses autres applications dans divers domaines des sciences. Il s’intéresse aussi à promouvoir la fonction de Christoffel (bien connue en approximation) comme un outil complémentaire puissant et simple à utiliser en analyse de données.

Il a consacré une grande partie de sa vie de chercheur à l’optimisation mathématique dont il explique le principe : Comment résoudre un problème d’optimisation ? Il s’agit de trouver la valeur minimale d’une fonction mathématique à la forme complexe. “Imaginez-vous randonneur dans un massif montagneux accidenté : les sommets sont des valeurs maximales de la fonction, les vallées des valeur minimales, illustre Jean-Bernard Lasserre. Le marcheur le sait d’expérience : il atteint une valeur minimale lorsque, dans toutes les directions alentours, la pente remonte… mais est-il sûr d’avoir rejoint la vallée la plus profonde (et donc de valeur minimale la plus petite) ?”. En optimisation globale, les mathématiciens recherchent la valeur minimale “globale” (le fond de la vallée la plus profonde) et non une valeur minimale “locale” (le fond d’une autre vallée moins profonde).

Il reconnaît également l’importance des collaborations auxquelles il a participé :

“Tout au long de ma carrière, j’ai eu la chance de me trouver au bon endroit, au bon moment, et de travailler avec des chercheurs de très grande qualité.”

Le prix de l’innovation Inria-Dassaut Systèmes a été décerné à L’équipe CONVECS (Inria/LIG/CNRS/Université Grenoble Alpes/Grenoble INP) : Hubert Garavel, Frédéric Lang, Wendelin Serwe et Radu Mateescu.

Ces quatre chercheurs contribuent au développement de la boîte à outils CADP, dédiée à la modélisation et à la vérification des systèmes parallèles et distribués. L’objectif est de détecter automatiquement les erreurs de conception dans ces systèmes très complexes.

L’équipe CONVECS (Inria/LIG/CNRS/Université Grenoble Alpes/Grenoble INP) travaille depuis 15 ans sur un projet qui concerne le domaine des méthodes formelles pour la modélisation et la vérification de systèmes distribués avec du parallélisme asynchrone. L’équipe effectue des travaux pour modéliser les systèmes asynchrones et rendre les méthodes formelles plus accessibles, des techniques de compilation pour ces langages et des algorithmes de vérification pour ces systèmes. L’ensemble de ces techniques donne lieu à des outils qui sont intégrés de manière cohérente dans une boite à outils nommée CADP. Hubert Garavel rappelle :

“Les premiers ordinateurs fonctionnaient avec un seul processeur, qui exécutait ligne à ligne ce qui lui était imposé par le programme. Mais l’augmentation de performance conduit à avoir plusieurs processeurs et des programmes capables de s’exécuter en même temps, ce qui fait naître d’épineux problèmes de synchronisation et de communication.”

Le Prix Inria-Académie des sciences jeunes chercheurs et jeunes chercheuses est attribué à Serena Villata, chargée de recherche CNRS en informatique au Laboratoire I3S (CNRS/Université Côte d’Azur) et membre de l’équipe Wimmics (Inria Sophia Antipolis-Méditerranée/I3S)

Serena Villata crée des outils d’IA (intelligence artificielle) capables d’analyser la structure logique de n’importe quel texte, du discours politique au message Twitter. Une piste prometteuse pour combattre le harcèlement en ligne et les fake news. Spécialiste d’IA, ses travaux actuels portent sur l’argumentation, avec un focus sur l’analyse automatique des arguments dans les textes juridiques et médicaux, des arguments fallacieux dans les débats politiques et les contenus nuisibles dans les réseaux sociaux (discours de haine, désinformation). Elle s’intéresse à combiner l’argumentation formelle, basée sur le raisonnement critique, avec l’argumentation humaine.

Son parcours en trois étapes

  • Ses premiers travaux sur la théorie de l’argumentation formelle, en 2007 – « C’était un sujet à caractère fondamental, mais il pouvait donner naissance à de multiples applications dans la vraie vie : la plupart des échanges entre individus s’appuient sur des arguments. Mais à l’époque, ces applications semblaient futuristes et très ambitieuses… »
  • Ses débuts dans l’argumentation en langage naturel, en 2012 – « Je suis passée de la théorie informatique au concret et au quotidien : extraire automatiquement des arguments à partir des messages sur un forum, d’un débat politique, d’un texte de loi… Tout était à construire et je faisais partie des pionnières ; c’était le bon moment pour s’y mettre. »
  • Ses projets sur des sujets de société, à partir de 2018 – “Mes recherches ont commencé à s’orienter vers la prévention de la haine en ligne, la propagande, la désinformation… C’est important pour moi de sentir que mes travaux ont une réelle utilité sociale.”

“Le grand défi du moment dans mon domaine, c’est de concevoir un chatbot capable de dialoguer en langage naturel avec des utilisateurs, par exemple des scolaires, pour les aider à développer leur esprit critique. Il pourrait leur expliquer un sujet, l’illustrer par des exemples, opposer des contre-arguments aux fake news qu’il suscite, décrire les effets dévastateurs de la propagation de ces fake news, etc.

C’est un objectif très ambitieux : le chatbot sociologues, etc. »devrait pouvoir traiter de manière automatique n’importe quel thème, sans y être préparé, en s’adaptant aux connaissances de l’interlocuteur. De plus, il faut éviter qu’un tel outil soit détourné pour des campagnes de désinformation. Sa conception doit être multidisciplinaire, et associer aux informaticiens des juristes, des sociologues, etc….”

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