IA, HPC et cloud pour accélérer le développement de la future génération de batteries

La découverte de nouveaux matériaux est un processus long et coûteux, qui repose souvent sur des expériences empiriques et des simulations complexes. Pour accélérer la découverte d’électrolytes solides pour les batteries, un domaine de recherche très actif en raison des enjeux environnementaux et économiques liés au stockage de l’énergie, des chercheurs de Microsoft et du Pacific Northwest National Laboratory ont développé une approche innovante qui combine IA et calcul haute performance (HPC) dans le cloud. Leur méthode leur a permis d’explorer un vaste espace chimique et de prédire de nouveaux matériaux stables et fonctionnels, qu’ils ont ensuite synthétisé et caractérisé expérimentalement.

Les électrolytes sont des matériaux qui permettent le transport des ions entre les électrodes d’une batterie. Dans les batteries lithium-ion, utilisées dans une large gamme d’applications, des smartphones aux véhicules électriques, les électrolytes qui transportent les ions entre les deux électrodes de la batterie, l’anode et la cathode, sont liquides, potentiellement inflammables ou toxiques.

Le développement de batteries à électrolytes solides qui offrent des avantages en termes de sécurité, de performance et de durabilité est un objectif majeur des scientifiques des matériaux. Il est d’ailleurs l’objectif du projet ELIAS, porté par Saft et mis en œuvre par un consortium d’acteurs académiques et industriels, lancé en mai 2023 et soutenu par France 2030.

Cependant, il est difficile de trouver des électrolytes solides qui réunissent toutes les propriétés requises, telles que la stabilité thermique, la stabilité électrochimique, la conductivité ionique et la compatibilité avec les autres composants de la batterie.

Pour relever ce défi, les chercheurs de Microsoft et du Pacific Northwest National Laboratory ont utilisé des modèles d’IA pour filtrer plus de 32 millions de candidats selon des critères de stabilité, de bande interdite, de fenêtre de stabilité électrochimique et de diffusivité des ions Li ou Na. Ces modèles d’IA sont basés sur des réseaux neuronaux de graphes, capables de représenter et d’apprendre les propriétés des structures cristallines, comme l’ont démontré récemment les chercheurs de Google DeepMind avec GNoME.

Ils les ont entraînés sur des données issues de calculs quantiques et de bases de données publiques et les ont déployés sur des ressources de calcul dans le cloud, ce qui a permis de réduire le temps et le coût de la découverte de matériaux.

Parmi les candidats filtrés par les modèles d’IA, les auteurs ont sélectionné les plus prometteurs pour les soumettre à des calculs plus précis basés sur la théorie de la fonctionnelle de la densité (DFT) et la dynamique moléculaire ab initio (AIMD). Ces calculs, effectués sur Azure Quantum Elements de Microsoft, qui donne accès à un superordinateur basé sur le cloud et adapté à la recherche en chimie et en science des matériaux, ont permis de confirmer la stabilité et la conductivité des matériaux, ainsi que d’évaluer d’autres propriétés comme la dureté, la densité et le coût. Les chercheurs ont également éliminé les matériaux rares ou toxiques et ainsi identifié 23 candidats finaux, dont 5 déjà connus.

Ils ont ensuite synthétisé et caractérisé les structures et les conductivités de leurs meilleurs candidats. Au lieu d’utiliser soit des ions lithium (Li) soit des ions sodium (Na) comme conducteurs, ils ont choisi une approche peu conventionnelle : les combiner. L’introduction de Li à la place de Na a considérablement amélioré la conductivité ionique dans un nouveau matériau d’électrolyte solide prometteur, Na2LiYCl6, par rapport au matériau parent Na3YCl6. De plus, l’introduction de lithium a entraîné une réduction significative de l’énergie d’activation par rapport au matériau parent, ce qui indique un processus de diffusion ionique plus efficace. Cette amélioration de la conductivité et la réduction de l’énergie d’activation sont probablement dues à la présence des ions Li+ dans le transport ionique, ainsi qu’à des modifications potentielles de la structure cristalline.

Ce nouveau matériau ouvre des perspectives pour la conception de batteries solides polyvalentes. Les auteurs soulignent que l’intégration de l’IA et du HPC dans le cloud permet non seulement d’accélérer la découverte de matériaux, mais aussi de démocratiser le processus de découverte en rendant les ressources de calcul facilement accessibles et reproductibles.

Leurs travaux illustrent le potentiel de l’IA et du HPC dans le cloud pour transformer la découverte de matériaux et favoriser l’innovation scientifique et technologique. Les auteurs envisagent de poursuivre leurs recherches en explorant d’autres espaces chimiques, en affinant leurs modèles d’IA et en validant leurs candidats dans des systèmes de batteries solides. Ils espèrent que leur approche inspirera d’autres chercheurs pour la découverte de nouveaux matériaux avec des propriétés ciblées.

Références de l’article :

“Accelerating computational materials discovery with artificial intelligence and cloud high-performance computing: from large-scale screening to experimental validation” arXiv:2401.04070v1 8/01/2024

Auteurs :
Chi Chen1, Dan Thien Nguyen2, Shannon J. Lee2, Nathan A. Baker1, Ajay S. Karakoti2, Linda Lauw1, Craig Owen3, Karl T. Mueller2, Brian A. Bilodeau1, Vijayakumar Murugesan2, Matthias Troyer1

1 Azure Quantum, Microsoft,
2 Physical and Computational Sciences Directorate, Pacific Northwest National Laboratory,
3 Microsoft Surface, Microsoft.

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