Des chercheurs utilisent le deep learning pour classifier les tumeurs du cerveau

Une équipe de chercheurs des Centres médicaux universitaires d’Amsterdam, du Centre d’oncologie pédiatrique Princess Máxima et de l’UMC Utrecht ont développé un réseau neuronal qui accélère l’identification des tumeurs du cerveau, permettant ainsi aux neurochirurgiens d’ajuster leurs stratégies chirurgicales. L’étude a été récemment publiée dans Nature.

Le cancer du système nerveux central (SNC) est l’un des cancers les plus graves, en particulier chez les enfants. Si la résection neurochirurgicale de la tumeur permet de sauver la vie de ces patients, lors de l’intervention, les neurochirurgiens ne savent pas précisément de quel type de tumeur cérébrale il s’agit ni quel est son degré d’agressivité. Le diagnostic exact n’est généralement disponible qu’une semaine après la chirurgie, après que le tissu tumoral ait été analysé visuellement et moléculairement par le pathologiste.

Les chercheurs ont utilisé l’apprentissage par transfert pour entraîner Sturgeon, un réseau neuronal indépendant du patient, qui permet la sous-classification moléculaire des tumeurs malignes du SNC. Ils ont démontré son applicabilité en temps réel lors de 25 interventions chirurgicales, obtenant un diagnostic en moins de 90 minutes.

Pour le Centre Princesse Máxima, les résultats de la technique sont suffisamment fiables et il l’utilise déjà. L’UMC d’Amsterdam utilisera lui aussi la technique dans la pratique quotidienne, pour l’aider à accélérer le diagnostic.

Le Professeur Eelco Hoving, neurochirurgien pédiatrique et directeur clinique de neuro-oncologie au Centre Máxima, explique :

“Lors de l’opération, un petit reste de tissu tumoral est parfois délibérément laissé sur place pour éviter les dommages neurologiques. Mais s’il s’avère plus tard, par exemple, que la tumeur est très agressive, une deuxième intervention chirurgicale peut encore être nécessaire pour enlever ce dernier reste. Cela créera encore une fois des risques et du stress pour les patients et leurs familles. Cela peut être évité maintenant, car nous saurons déjà lors de la première intervention à quel type de tumeur nous avons affaire”.

La classification ultra-rapide des tumeurs du SNC pendant la chirurgie

Les approches actuelles, telles que l’imagerie préopératoire et l’analyse histologique peropératoire, obtenues par une évaluation histologique rapide des coupes tumorales gelées, ne s’avèrent pas totalement fiables.

Les chercheurs ont utilisé la technologie de séquençage Nanopore qui permet de lire l’ADN en temps réel et ont entraîné un système de quatre réseaux neuronaux à analyser en temps réel et classifier ces séquences.

Pour pallier au nombre limité de données et d’échantillons de référence, ils ont créé un ensemble de données étiqueté de près de 17 millions de séquences d’ADN artificielles de 94 types de tumeurs.

Les modèles ont été entraînés sur 36,8 millions de cycles de nanopores simulés et validés sur 4,2 millions de cycles de nanopores simulés. Le modèle Sturgeon qui en résulte ne prend que quelques secondes pour fonctionner sur un ordinateur portable.

Les résultats

Afin d’évaluer en détail la robustesse de Sturgeon et sa sensibilité aux biais des lots et des opérateurs, les chercheurs l’ont évalué sur un ensemble de données de séquençage de nanopores accessible au public. Testé sur les échantillons prélevés lors de 25 interventions, il a correctement classé 18 tumeurs, n’atteignant pas le niveau de confiance acceptable pour les 7 autres.

L’algorithme pourrait permettre d’identifier le type de tumeur en 20 à 40 minutes. Les chercheurs envisagent de le recycler ou de l’affiner au fur et à mesure que de nouvelles données seront disponibles, il pourrait ainsi identifier d’autres types de tumeurs. En attendant, leur approche a le potentiel de sauver de nombreuses vies et de contribuer à la qualité de vie des patients.

Références de l’article :

“Classification ultra-rapide des tumeurs du SNC à apprentissage profond pendant la chirurgie” Nature https://doi.org/10.1038/s41586-023-06615-2

Auteurs et affiliations :

C. Vermeulen, M. Pagès-Gallego, J. de Ridder, Oncode Institute, Utrecht, Centre de médecine moléculaire, UMC Utrecht

L. Kester, M. E. G. Kranendonk, J. van der Lugt, K. van Baarsen, E. W. Hoving, B. B. J. Tops, Centre d’oncologie pédiatrique Princess Máxima, Utrecht, Pays-Bas

N. Verburg, P. de Witt Hamer, Département de neurochirurgie, Centres médicaux universitaires d’Amsterdam/VUmc

E. J. Kooi, Département de pathologie, Centres médicaux universitaires d’Amsterdam/VUmc,

L. Dankmeijer,  Département de pathologie, Centres médicaux universitaires d’Amsterdam/VUmc, Amsterdam, Département de neurochirurgie, Centres médicaux universitaires d’Amsterdam/VUmc, Amsterdam.

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